[Avis Film] Les Délices de Tokyo (An) de Naomi Kawase

Avant, toute chose, je dois vous dire que je raffole des dorayakis et d’autres douceurs sucrées japonaises. Je pensais voir un film sur la cuisine avec les Délices de Tokyo, j’ai été surprise car… le voyage a été au-delà de la pâtisserie…

Synopsis:
Les dorayakis sont des pâtisseries traditionnelles japonaises qui se composent de deux pancakes fourrés de pâte de haricots rouges confits, « AN ».
Tokue, une femme de 70 ans, va tenter de convaincre Sentaro, le vendeur de dorayakis, de l’embaucher.
Tokue a le secret d’une pâte exquise et la petite échoppe devient un endroit incontournable…

Mon avis:

Naomi Kawase pose un regard plein de tendresse sur ses protagonistes principaux. Trois héros de générations différentes, un homme dans la quarantaine, une adolescente et une vieille femme de 70 ans. Chacun a son son destin. Ils viennent tous heurter la vie de l’autre avec leur cœur. Les trajectoires se croisent le temps d’une période. Elles ne laisseront personne sur le même chemin du départ. Elles regroupent ces êtres de l’ombre, ses héros qui mériteraient d’être mis en lumière.
Les délices de Tokyo permet de plonger dans une part ignorée de la société. Du moins pour moi, je ne connaissais pas cet envers du décor. Ce rejet, ce village et ce monde en autarcie. Tout un pan où des mains invisibles pour les uns continuent de vivre, à chercher le soleil, à aimer, à sourire.


Le charme de la photographie m’a séduite. Cet assemblage de plans montrant les cerisiers en fleur, la nature dans sa splendeur, cette beauté qui s’éveille, grandit, s’épanouit. Comme si elle accompagnait les héros. Comme si elle représentait leur cœur qui s’émerveille et sort de la torpeur. Du chant des oiseaux, aux feuilles, à la lumière qui filtre à travers les branches, à cette douceur, malgré les lieux urbains, la vie semble faire fie des artifices pour se focaliser sur le fond. Les images s’avèrent d’une poésie touchante, délicieusement douce, presque intime, mêlant contemplation à des idées plus profondes. J’ai eu les yeux émerveillés, des papillons et une immense impression d’être dans un cocon devant le film.
La réalisatrice installe la grande majorité de son action dans un espace retreint, une petite boutique de dorayakis, au design simple, presque brute, limite austère. Loin de créer une atmosphère étouffante, l’ambiance étouffe le rapprochement de plusieurs solitudes. De ces êtres qui sans s’en rendre compte apprennent à vivre, à lâcher prise et à sourire.
Dans ce petit réduit, trois vies se métamorphosent. Trois visions du monde se percutent. La grisaille s’efface. Tokue du haut de ses 70 ans bouleverse son patron et la jeune lycéenne. Décalée, souriante, toujours émerveillée, c’est une bouffée de fraîcheur. Malgré les circonstances, la vieille dame garde espoir. Rien n’a réussi à la faire courber. Une palette d’émotions naissent à son contact. Joie, tristesse, inconscience, innocence.


Les Délices de Tokyo sont une balade étonnante. Elle transporte, apportant une vision du Japon, des laissés pour compte qui laissent songeur. Le film met en parallèle trois générations. Sentaro, tout en pudeur, plus en retrait, se fâne dans son travail. Le poids des responsabilités l’étouffe. La rencontre avec Tokue change tout. Wakana est la jeunesse. L’espoir et la magie du lendemain avec une pointe de tout est encore possible. Tous les trois sont discrets dans leur ressenti, souffrant d’une certaine solitude. Ils ont tous leurs démons, leurs soucis. Pourtant, chacun apportera à l’autre cette petite pierre qui lui sera nécessaire pour paver sa route.
Le tableau dressé m’a bouleversé. Je m’attendais à une incursion dans les pâtisseries japonaises. J’ai découvert non seulement comment les dorayakis étaient réalisés mais une part de sagesse douce amère exceptionnelle. Un bel hymne à dépasser les idées préconçues, à se libérer des chaînes pour apprendre à voir son propre chemin.
Les délices de Tokyo ont cette force d’attraction étrange, déroutante, mélancolique, irrésistible, et indescriptible. Ce charme dont l’approche est délicat, léger comme une plume mais accroche irrémédiablement le cœur.

Les delices de Tokyo - Affiche
Les Délices de Tokyo sont une douceur riche, sucrée, douce, amère, passionnante. Un bonbon étonnant, dur et tendre à la fois, une merveilleuse histoire d’amitiés, de passage, de reconnaissances hors normes, de ces quiproppos qui vous poussent à sortir du carcan, prendre votre envol. L’un des plus beaux films de mon début d’année, magnifique, poétique et somptueux comme un cerisier en fleur.


Ma note:
10/10
*Coup de coeur*

Informations:
Titre vo: An
Date de sortie: 27 janvier 2016
Durée: 1h 53min
De Naomi Kawase
Distributeur: Haut et Court
Avec: Kirin Kiki, Masatoshi Nagase, Kyara Uchida
Genres: Drame, Comédie
Nationalités Français, Allemand, Japonais

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